lundi 1 janvier 2018

Prédication pour le premier jour de l’an



Pour bien commencer le nouvel an, je vous propose de découvrir un sermon que Jean-Frédéric Nardin (1687-1728) a donné il y a presque trois siècles, le 1 janvier 1721.

Dans son  sermon, Nardin part d’un texte évoquant la circoncision de Jésus: 
 …  Quand huit jours furent accomplis, il fut circoncis et on lui donna le nom de Jésus, celui que l’ange avait indiqué avant sa conception. …  (Lc 2.21 ; NBS)
L’essentiel du sermon est consacré à la transposition aux croyants de la circoncision de Jésus et du fait qu’il reçoit son nom. Dans un premier temps, Nardin évoque ce qu’il appelle la « circoncision spirituelle ». Il entend par là un dépouillement qui comprend la justification et le pardon des péchés, suivis par le renoncement au péché et la mortification de la chair et de ses convoitises. (En termes habituels de la sotériologie, ce serait la justification et le début de la sanctification.) L’homme commence à s’opposer aux mauvais désirs et ne laisse plus le péché régner dans son corps. Ce retranchement est douloureux, mais il est à la portée de tout enfant de Dieu.

Nardin pose la question de savoir quand cette circoncision spirituelle doit intervenir. Pour lui, elle doit suivre de près la nouvelle naissance, mais Dieu ne bouscule pas non plus ses enfants ; il fait son œuvre avec beaucoup de tact et de doigté.

A la question du pourquoi de la circoncision spirituelle, Nardin répond qu’il s’agit d’une expression de l’obéissance due à Dieu, mais aussi d’un premier pas sur le chemin de croix que prend le chrétien qui cherche à suivre Jésus.

La deuxième partie de la prédication est consacrée au nom nouveau que reçoit l’homme qui a expérimenté la circoncision spirituelle, un nom qui exprime une réalité sous-jacente et qui confère une grande dignité.

Le sermon se termine avec une exhortation à s’examiner soi-même pour savoir si on a effectivement vécu la circoncision spirituelle. S’il n’y a pas de progrès dans la vie chrétienne, il faut se poser la question si on est réellement chrétien. Si ce n’est pas le cas, il faut implorer Dieu pour qu’il nous offre cette grâce.

Vous pouvez télécharger le texte du sermon dans une version dont j’ai modernisé l’orthographe et annoté les termes devenus obscurs pour nos oreilles modernes, en cliquant ici

Si vous préférez lire l’original du XVIIIe siècle, cliquez plutôt ici

Et si vous voulez écouter la prédication plutôt que de lire le sermon - il faudra tout de même une heure et demie pour le faire - c’est ici.

En bonus, voici le texte d’une lettre de Nardin à sa mère, dans laquelle il évoque ce sermon :

A Blamont le 3 Janvier 1721 

Ma chère Mère ! 

Voici enfin la dernière prédication qui ferme les dimanches de toute une année ; de sorte que je crois que depuis le dimanche qui suivra celui-ci jusqu’à celui-ci qui les ferme ; vous devez avoir des prédications sur tous les dimanches de l’année passée. Je loue et bénis ce grand Dieu de la grâce qu’il m’a faite de mener à sa fin cette œuvre. Je mets aux pieds de son trône ce qu’il y a de bon : Je souhaite que cela retourne à lui comme à sa source, et ce qu’il y a de bas, de faible et de clochant, je le reconnais volontiers pour mien. Grand Dieu ! C’est à toi qu’appartient toute la gloire et à moi la confusion de face. Fais, je te prie, que tous bons dons qui viennent de toi soient renvoyés à leur source pure, et que les hommes ne s’arrêtent point aux marais puants des pauvres hommes, qu’ils n’y laissent point écouler tes dons en louant et en estimant les hommes; pendant qu’ils en doivent louer et glorifier le Créateur. Je souhaiterais, ma chère Mère, que pour nôtre nouvel an, Dieu nous fît la grâce de nous donner et de nous faire goûter la douce et puissante réalité des glorieux Evangiles sur lesquels nous avons fait ces prédications. Ah ! Ce Dieu riche ne souhaite rien plus que de nous communiquer ces précieux biens qu’il nous présente, il ne souhaite rien plus que de nous en pouvoir enrichir ; il voudrait seulement que nous voulussions ouvrir nos bouches et nos cœurs pour les recevoir. C’est en vérité la source du bonheur et de toute félicité, que d’être ouvert à Dieu. Si je devais donc vous souhaiter quelque chose au commencement de cette année, c’est cela, ma chère Mère, que je vous souhaiterais ; que le Seigneur Jésus par la puissance de son Esprit et de sa grâce ouvre vôtre cœur et toutes les portes de vôtre âme à Dieu, pour le recevoir dans vous ; et plus vous vous ouvrirez à Dieu et plus goûterez-vous le vrai et solide bonheur, et plus vous vous fermerez à Dieu, et moins expérimenterez-vous le véritable contentement et la félicité réelle d’une âme immortelle. Certes, en Dieu est la source de tous les biens, et temporels et spirituels et éternels. Autant que vous aurez de Dieu, autant aussi aurez-vous de biens et dans le temps et dans l’éternité. Je crois que j’aurai le bien de vous voir la semaine prochaine et de vous réitérer de bouche les vœux que je fais à Dieu pour vôtre solide félicité. En attendant, je vous recommande avec tous les nôtres à la grâce et bonté de nôtre Dieu, et suis avec beaucoup de respect et de soumission, 

Ma chère Mère, 
Vôtre très obéissant Fils 
J. Frid. Nardin.

NB : Si vous avez lu ou écouté le sermon de Basnage que je vous ai proposé il y a une semaine, vous serez saisis de la grande différence entre le texte cérébral du théologien Basnage, qui nous emporte dans les hauteurs de la christologie, et celui du piétiste Nardin, qui s’intéresse au cœur du chrétien et ses progrès dans la sanctification. Les deux sermons ont été donnés à seulement 14 ans d’intervalle, et la distance entre Blamont et Rotterdam est inférieure à 500 km, mais des mondes séparent ces deux textes, dont chacun, me semble-t-il, a quelque chose à nous dire. Grandiose variété de la chaire chrétienne ! Soli deo gloria.

Bonne année 2018 !

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